Quelques pivoines pour passionnés

Nous adorons tous les grosses pivoines, opulentes et parfumées, dont nous pouvons cueillir des brassées entières pour les bouquets. Ce sont des cultivars de l’espèce Paeonia lactiflora, originaire de Chine. Si elles font de formidables fleurs coupées, la plante en elle-même n’offre pas grand intérêt une fois la floraison terminée. Pour cette raison, il vaut mieux les planter dans un espace réservé aux fleurs à couper, le potager par exemple. En revanche, il existe de nombreuses autre espèces de pivoines plus sauvages, légères et délicates, qui s’intègrent mieux au jardin. Plus rares et plus chères, elles sont surtout prisées par les collectionneurs. C’est dommage, car rien n’est plus solide et durable qu’un plant de pivoine.

Paeonia mlokosewitschii

Cette espèce-ci est une des plus emblématiques, pour une mauvaise raison: son nom épouvantable! On l’appelle heureusement aussi pivoine dorée ou pivoine du Caucase. C’est effectivement sur les pentes de cette chaîne de montagne qu’elle fut découverte par le botaniste polonais Ludwik Franciszek Młokosiewicz dans la seconde moitié du 19ème siècle. Il avait exploré la Géorgie lorsqu’il fut enrôlé dans l’armée impériale russe. Actuellement, on la classe comme une des nombreuses sous-espèces de P. daurica.

Cette délicate pivoine simple éclot tôt au printemps et se maintient bien sans support. La feuille obovale (comme un oeuf avec la partie plus large au bout), est d’un beau vert clair et forme un monticule élégant même après la floraison. Un seul exemplaire de cette plante, bien mis en valeur dans une rocaille par exemple, peut suffire à son bonheur.

Paeonia lutea

Restons dans le jaune avec Paeonia lutea (luteus c’est jaune en latin). Je simplifie car on la trouve aussi sous le nom de P. ludlowii (la nomenclature des pivoines est une jungle!). L’espèce est aussi une montagnarde, originaire cette fois du Tibet. Nous avons affaire ici à une plante très différente, de grande taille, au-delà du mètre cinquante, convenant pour l’arrière des parterres. On la classe d’ailleurs parmi les pivoines arborescentes et ses tiges ligneuses restent bien visibles l’hiver. Les petites fleurs jaune vif éclosent fin mai, début juin. Les longues feuilles claires et finement découpées restent très attractives et sont très utiles dans les bouquets. Une ou deux plantes formeront rapidement une belle masse, fleurissant avant l’arrivée des fleurs d’été et constituant un beau fonds pour le reste de la saison.

Paeonia emodi

Originaire également du Tibet, mais aussi du Népal et du Cachemire, Paeonia emodi est par contre une pivoine herbacée qui disparaît complètement sous terre en hiver. C’est probablement la plus haute des pivoines herbacées. On l’appelle également pivoine de l’Himalaya, car l’épithète de son nom botanique provient du nom latin pour l’Himalaya: emodi montes. Elle y pousse en haute altitude, jusqu’à 2500 m.

Les fleurs, simples et assez petites, ressemblent à un oeuf sur le plat; les pétales blanc pur entourent des étamines portant une masse d’anthères jaune d’oeuf. Il y a plusieurs boutons par tige mais les fleurs étant petites, la plante n’a pas besoin de supports et se maintient bien droite dans les parterres. Un des attraits principaux de cette pivoine botanique sont ses longues feuilles vert vif, profondément incisées et comptant une quinzaine de folioles. Paeonia emodi est un véritable atout du jardin de mai.

Paeonia rockii

Nommée pour le botaniste et explorateur américain Joseph Rock, cette beauté-ci est une pivoine ligneuse provenant elle aussi des montagnes de Chine. Ses fleurs molles sont de la taille d’une assiette et fines comme du papier crépon. L’espèce d’origine est le plus souvent blanche avec des marques sombres distinctives à la base des pétales. J’ai pu constater que le plante se ressème spontanément au jardin. Au fil des ans, ces semis ont produit de très jolies fleurs plus ou moins teintées de rose, mais ayant perdu leur beau coeur noir.

Voici quelques autres espèces botaniques, dont P. mascula, une turque qui ne fleurit malheureusement que quelques jours, P. obovata, une japonaise qui forme une belle fleur ronde couleur chair et P. tenuifolia au feuillage très découpé et décoratif.

Paeonia peregrina forme une très belle touffe après quelques années avec un magnifique feuillage. Cette espèce est très caractéristique avec sa fleur toute ronde d’un rouge vif et brillant.

Vous l’aurez compris, la plupart des pivoines sauvages sont des montagnardes. Un des spectacles les plus étonnants que j’aie eu la chance de voir est un flanc de montagne couvert de pivoines sauvages au Kirghizstan. C’était lors d’un voyage de la International Dendrology Society et les experts présents l’ont identifiée comme Paeonia hybrida.

J’adore les grosses pivoines horticoles pour les bouquets que vous pouvez retrouver dans l’article ‘Opulence capiteuse’ de juin 2020 (il y a 3 ans déjà!). Cependant, les fleurs simples et pures, telles que la nature les a faites, ont un charme indéniable.

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