L’arbre de Judée… ou de Judas?

Voici un petit arbre à floraison printanière rose qui nous change un peu des cerisiers et des pommiers: Cercis siliquastrum, dit arbre de Judée en français. L’espèce est en effet indigène du pourtour de la Méditerranée. On parle parfois d’arbre de Judas et c’est le cas dans la plupart des langues. Divers mythes entourent ce nom. On prétend que Judas se serait pendu à une branche de cet arbre après avoir trahi Jésus. Selon une autre version, les gousses sombres qui pendent aux branches ressembleraient à un pendu. Tout cela n’est probablement que légende. A mon sens, ce petit arbre délicat et joyeux ne me paraît pas le plus indiqué pour y jeter une corde…

Toujours est-il que Cercis siliquastrum pousse effectivement au Proche-Orient, en Turquie et autour de la Méditerranée et fleurit à l’époque de Pâques. Le plus beau spectacle que j’aie pu voir sont les collines égayées de rose dans la région des Météores dans le nord de la Grèce. On distingue encore de la neige sur les pics de l’Epire à l’arrière plan alors que la vallée connaît une explosion de couleurs.

Aimant le soleil et un sol drainé, l’arbre de Judée est bien résistant à la sécheresse. Il supporte le gel jusqu’à -10°C environ mais dans les latitudes plus nordiques il devra être planté dans un lieu abrité.

Ce qui caractérise les Cercis, ce sont ses petites fleurs roses ou violacées, semblables à des fleurs de petits pois, qui couvrent littéralement les rameaux avant l’émergence des feuilles. Le genre fait partie en effet partie de la famille des Fabaceae, ou légumineuses, comme les fèves et les pois. Ces fleurs sont sessiles (littéralement assises), ce qui veut dire qu’elles n’ont pas de pédoncule et sont attachées directement aux branches, parfois même au tronc. Elles sont très riches en nectar et pollinisées par les abeilles. Il existe une variante ‘Alba’ à fleurs blanches, plus rare.

Toutes ces petites fleurs sont ensuite suivies de gousses ou plus précisément de siliques dont la couleur passe du vert, au rouge, puis au brun. Siliqua veut dire gousse en latin et a donné son nom à l’espèce siliquastrum. Sa forme évoque la navette du tisserand, kerkis en grec, ce qui a donné le nom de genre Cercis.
Bien que dissimulées dans le feuillage, cette masse de gousses brunes donne un aspect un peu triste à l’arbre.

Les oiseaux, les mésanges en particulier, apprécient beaucoup les semences et les disséminent. Des semis naissent en nombre aux alentours.

En choisissant un emplacement pour un arbre de Judée, tenez compte du fait qu’il fera tomber d’abord un tapis de fleurs roses, puis les feuilles à l’automne et enfin les gousses à la fin de l’hiver. Mieux vaut éviter de le planter près d’une terrasse car vous passerez beaucoup de temps à balayer…

Pour les plus petits jardins et le climats plus froids il y a un cultivar intéressant d’une espèce asiatique qu’il vaut la peine de chercher en ligne ou dans les foires de plantes: Cercis chinensis ‘Avondale’. Il a reçu la distinction de la Société Royale d’Horticulture britannique. A la différence de l’arbre de Judée classique, l’espèce chinoise forme plutôt un grand buisson érigé avec de nombreuses tiges et ne dépasse pas 4 m. Il résiste jusqu’à -25 °C.

Tout aussi rustique, l’espèce de l’est américain, Cercis canadensis, forme un petit arbre très gracieux de 4 m environ . Le cultivar pourpre ‘Forest Pansy’ est très populaire depuis plusieurs années déjà. Après la floraison printanière rose classique des Cercis, le feuillage devient pourpre foncé tout l’été avant de déployer une palette étonnante à l’automne.

La feuille en forme de coeur est la signature des Cercis. Chez ‘Forest Pansy’, des petits coeurs luisants couleur vin apparaissent à la fin de la floraison. A l’automne, ce sont les tons cuivre qui dominent avec du rose sur l’envers de la feuille. Vu en transparence, le détail est magnifique. Le tapis des feuilles tombées est une oeuvre d’art.

Cercis canadensis ‘Eternal Flame’ est une sélection plus récente et probablement plus spectaculaire encore que la précédente par ses contrastes de couleur, tant en robe d’été qu’à l’automne. ‘Eternal Flame’ a été élu plante de l’année au Chelsea Flower Show de 2021.

.

‘Merlot’, comme son nom l’indique, reste dans les tons vineux mais est présenté comme plus compact que ‘Forest Pansy’.

Beaucoup de développements horticoles sont en cours sur l’espèce américaine, produisant des feuillages de couleurs variées. Voici par exemple ‘Melon Beauty’ et ‘The Rising Sun’ pour un feuillage or. ‘Carolina Sweetheart’ conjugue différents tons de blanc et de rose au débourrage. Le plus étrange par le nom est ‘Alley Cat’ , variégé vert et blanc.

Il existe enfin un Cercis canadensis pleureur: ‘Lavender Twist’.

La forme de la feuille de nos Cercis est si caractéristique qu’il y a tout un genre qui a été nommé Cercidiphyllum (à feuille de Cercis): c’est l’arbre à caramel. Mais cela, c’est une autre histoire…

Suivant
Suivant

Pâques en miniature