Deux arbres bleus pour des cieux bleus
Les arbres à floraison printanière portent le plus souvent des fleurs roses ou blanches, parfois jaunes ou rouges. En revanche, les fleurs bleues sont rares et vraiment admirables, surtout sur fond de ciel bleu. Découvrez le Jacaranda et le Paulownia qui font rêver les jardiniers.
Jacaranda mimosifolia
Voici un parc de Buenos Aires et une rue de Lisbonne au printemps. On ne peut que s’extasier devant ces grands arbres couverts d’énormes panicules de fleurs bleu violacé. Originaire du nord de l’Argentine et de la zone avoisinante du Brésil, du Paraguay et de Bolivie, ces arbres ornementaux ombragent aujourd’hui les rues et les parcs de l’Espagne, du Portugal, du Midi de la France, mais aussi de la Californie, de l’Australie et de l’Afrique du Sud. La beauté aide à conquérir le monde!
Si le nom de jacaranda provient du nom guarini pour la plante, en français on parle parfois de flamboyant bleu, et on comprend pourquoi.
Une longue première floraison printanière, pouvant durer d’avril à juin dans l’hémisphère nord, commence sur le bois nu. Une seconde floraison est fréquente après les premières pluies de fin d’été.
En conditions favorables, la plante pousse très rapidement et peut atteindre 20m de haut et une belle largeur de la cîme, ce qui lui permet d’ombrager les rues avec ses longues branches tortueuses. La ville convient bien au jacaranda car il a deux ennemis: le vent et le gel. Cet exotique ne supporte absolument ni les gelées ni les vents froids. Il est donc le privilège des jardins abrités des climats doux. Une fois installé il supporte la sécheresse estivale malgré son origine subtropicale.
L’effet saisissant est dû aux très grands panicules de fleurs bleues. Celles-ci sont en forme de trompettes de 5cm de long, la corolle se terminant par 5 lobes arrondis. C’est une des caractéristiques qui place le jacaranda dans la famille de bignoniaceae aux côtés du Bignonia, du Campsis, du Catalpa et d’un grand nombre d’autres genres aux fleurs tubulaires. Ces fleurs sont mellifères.
Il faudra parfois attendre sa récompense; l’arbre peut ne pas fleurir avant plusieurs années.
L’attente sera facilitée par le très beau feuillage, bipenné comme certaines fougères. Il ressemble au feuillage du mimosa, ce qui explique le nom de l’espèce: mimosifolia. Ces grandes plumes vert clair offrent une ombre légère idéale pour l’été. Ce n’est qu’à la fin de l’hiver que les feuilles tombent.
Sur cette image on voit la seconde floraison de septembre, en présence des feuilles. On peut aussi distinguer les curieuses gousses rondes, très décoratives séchées, qui contiennent les semences.
Si vous n’avez pas les conditions climatiques pour faire prospérer un jacaranda en pleine terre, il est envisageable de le cultiver en pot à rentrer au chaud l’hiver. Vous profiterez d’un très beau feuillage à défaut de fleurs. Il faut dans ce cas recouper la plante à la fin de l’hiver. Si un jeune arbre gèle, il repousse souvent vigoureusement du pied, formant un buisson.
Heureusement il existe un autre arbre bleu qui, lui, est rustique jusqu’à -20°C.
Paulownia tomentosa
Venu d’un continent différent, le Paulownia est un arbre originaire de l’est de la Chine et de la Corée. Il nous est cependant arrivé par le Japon, ramené par le botaniste suédois Thunberg à la fin du 18ème. Philippe von Siebold, qui séjourna au Japon pour la Compagnie néerlandaise des Indes orientales, dédia la plante à la grande-duchesse de Russie Anna Pavlova en 1834. (A ne pas confondre avec la célèbre ballerine Anna Pavlova, si aérienne qu’on nomma pour elle une délicieuse meringue à la crème! ) Fille du Tsar Paul Ier, Anna avait épousé le roi Guillaume II des Pays-Bas, dans le contexte d’un renforcement des alliances après la défaite de Napoléon.
Tout ceci explique pourquoi on trouve le nom commun d’arbre impérial.
Tout comme le jacaranda, nous avons ici un arbre à développement rapide et important qui se couvre de grandes panicules de fleurs bleu pâle violacées sur le bois nu. Les fleurs sont elles aussi en forme de trompette et font penser aux digitales, raison pour laquelle en anglais on trouve parfois en anglais le nom de foxglove tree.
Tout est poilu chez le paulownia: le bouton floral, la corolle et la feuille. C’est ce qui a valu à l’espèce le qualificatif tomentosa, qui veut dire couvert de poils. Les grandes feuilles, en forme de coeur, sont opposées et ressemblent beaucoup aux feuilles d’un catalpa.
Tout comme le jacaranda, le paulownia peut être utilisé comme plante de feuillage. En le recépant au ras du sol après l’hiver on obtient des pousses spectaculaires en une saison et surtout des feuilles surdimensionnées. N’espérez cependant pas de fleurs en plus!
Cette caractéristique peut être mise à bon usage pour créer de la biomasse, nourrir du bétail ou enrichir le sol avec les feuilles riches en azote.
La floraison est suivie de grappes de capsules qui sèchent et restent sur la l’arbre, le rendant aisément reconnaissable l’hiver. Ces fruits secs s’ouvrent et dispersent de nombreuses graines, au point que le paulownia est considéré invasif dans certaines régions.
Produisant un bois léger mais résistant, l’arbre est apprécié en menuiserie. Ses nombres qualités en font un arbre d’avenir, notamment pour nos villes: il tolère la pollution, résiste à la sécheresse et au froid jusqu’à -20°C et capte efficacement le carbone. Pourtant ce bel arbre se voit encore rarement chez nous.