Les jolis coussinets de mai

Une promenade le long des villas de banlieue suffit pour découvrir des petits couvre-sols bien denses et vivement colorés dans tous les jardinets, débordant sur les graviers, retombant des murets. Ces petites vivaces en forme de coussinets sont extrêmement populaires et il y a de bonnes raisons à celà. L’effet est spectaculaire et quasi immédiat. On les achète en fleur sur les marchés et hop, c’est planté et le jardin est coloré. Le tout est de ne pas en abuser et à mon sens, de s’abstenir de mélanger les couleurs. Faisons un tour parmi les plus courantes.

IMG_0762.jpg

Le port très dense, très bas (10 à 30 cm), et rampant de ces petites vivaces est le résultat d’une adaptation à des conditions de vie extrêmes, souvent de haute montagne ou de bord de mer. Imaginez la rocaille, couverte de neige l’hiver, exposée au vent, à un soleil de plomb et à la sécheresse de l’été. De plus, imaginez une saison des plus courtes entre la fonte des neiges et la fin de l’été et des insectes rares pour la pollinisation. Vous aurez compris pourquoi un habitus en touffes denses et rases, une explosion de fleurs, une tolérance tant au froid qu’à la sécheresse et une prédilection pour les graviers sont des gages de survie. Toutes ces caractéristiques font que ces petites vivaces, si coriaces et peu exigeantes des conforts des parterres, conviennent parfaitement pour les jardins secs, les talus, les murets, les pots et les jauges.

Commençons par A (il y en a plusieurs) avec l’aubriète, Aubrieta deltoidea. Cette petite vivace appartient à la vaste famille des choux, les brassicacées, et se reconnaît aisément à ses fleurs à 4 pétales. La gamme des couleurs va du blanc au violet sombre. Le feuillage est vert-gris et attrayant. L’aubriète est la championne pour cascader du haut d’un mur, pouvant pendre de plus d’un mètre avec le temps. Un grand favori est la sélection ‘Purple Cascade’.

arabis-caucasica.jpeg

L’arabette, Arabis caucasica, est une cousine de l’aubriète, elle aussi une brassicacée. La forme de base de cette alpine est blanche mais elle se trouve également dans les tons roses. Le feuillage est gris. Comparé à l’aubriète, le port est moins régulier et plus lâche. La floraison est plus précoce, commençant en mars. Elle convient parfaitement pour les rocailles au soleil et revient d’année en année, ne craignant que l’humidité. Son nom lui fut donné par Linné, Arabis pour l’Arabie et sa prédilection pour les sols sablonneux.

Toujours en A, il y a la fameuse corbeille d’or, Aurinia saxatilis (synonyme Alyssum saxatile). Le nom d’espèce provient du latin saxum (rocher) et veut dire qui croît dans les rochers. Ce monticule de fleurs jaune vif, incroyablement dense, est un véritable rayon de soleil. Les fleurs sont si nombreuses qu’elles dissimulent complètement les feuilles. Elles offrent un festin de nectar et de pollen aux butineuses. La plante peut être rabattue après sa longue floraison pour lui garder une forme compacte. Sa couleur éclatante rend cette alpine un peu plus difficile à intégrer dans le jardin. Mélangée aux autres coussinets, violets ou roses en particulier, le résultat n’est pas toujours heureux…

Le nom de corbeille d’argent est donné abusivement à tous les petits monticules blancs, preuve que les noms communs sont sujets à confusion. Il semble toutefois que la vraie corbeille d’argent est l’Iberis sempervirens. Le nom indique clairement que la plante est originaire de la méditerranée et qu’elle a un feuillage persistant. Les petites feuilles pointues sont d’un beau vert foncé et bien que le feuillage disparaisse complètement sous la masse dense des fleurs, il est très net et décoratif pour le reste de la saison. Les rosettes des fleurs sont d’un blanc pur éclatant qui en font un coussin très lumineux. Comme pour la plupart des plantes mentionnées ici, la floraison est très longue et les fleurs sont mellifères.

Cerastium tomentosum forme lui aussi un coussin d’argent et est un vrai montagnard, résistant jusqu’à -35 °C. C’est une des vivaces les plus raffinées pour les murets et les graviers en plein soleil et elle s’étend rapidement par ses rhizomes. Le feuillage est tomenteux, ce qui veut dire couvert de poils soyeux formant un feutre gris, une protection naturelle contre le soleil. Cela lui a valu le nom commun de céraiste cotonneux. Ce feuillage rend la plante très attrayante même en dehors de la période de floraison printanière.

IMG_0594.jpg
IMG_0764.jpg

Vous connaissez sans doute bien les grands phlox parfumés des mixed borders. Le genre compte aussi de charmantes espèces rampantes, dont Phlox subulata, que l’on surnomme phlox mousse. Ce couvre-sol très florifère, que je recommande chaudement, provient des Etats-Unis où il colonise des pentes rocheuses. Les tiges rampent sur le sol et s’enracinent au fur et à mesure jusqu’à former de vastes tapis de fleurs. Il s’enfile joliment entre d’autres plantes et ourle les parterres et les bords des chemins. Le feuillage, très fin et vert vif, est bien persistant. Il existe une large gamme de couleurs pour toutes les situations, s’étendant du blanc pur, aux violets et au roses. Comme pour les grands phlox, il y a même des bicolores.

Les murs sont l’emplacement idéal pour les jolies petites campanules aux clochettes bleues. Elles semblent pousser à même la pierre, se contentant de minuscules anfractuosités pour s’ancrer et survivre. L’espèce porte nom redoutable de Campanula portenschlagiana. On doit ce genre de complexité à la contribution émérite à la botanique de la fin du 18ème siècle d’un dénommé Franz Edler von Portenschlag-Ledermayer! Heureusement, il existe un synonyme nettement plus user friendly: Campanula muralis. On l’appelle en conséquence campanule des murs ou campanule cascade. La floraison varie du blanc au violet et peut se prolonger du printemps à l’été et parfois se répéter à l’automne. Il y a plusieurs autres espèces de petites campanules de rocaille, assez ressemblantes, provenant de diverses zones montagneuses, dont Campanula carpatica, des Carpates comme son nom le dit et Campanula poscharskyana, de Serbie comme son nom ne le dit pas…

Le sujet des couvre-sols compacts de printemps est vaste et je n’ai fait que parler des plus communes. Je réserve les plus rares pour un prochain printemps. Celles décrites ci-dessus se voient et se trouvent partout et apportent un coup de couleur assuré. Ce concitoyen a visiblement pris un immense plaisir à les utiliser pour mettre en scène sa chèvre et ses cigognes en plâtre, ses amphores et ses boules de buis, dans son jardin tenu au bouton. Ces plantes de rocaille sont excellentes, mais comme pour toutes les bonnes choses, mieux vaut ne pas en abuser…

Le sujet des couvre-sols compacts de printemps est vaste et je n’ai fait que parler des plus communes. Je réserve les plus rares pour un prochain printemps. Celles décrites ci-dessus se voient et se trouvent partout et apportent un coup de couleur assuré. Ce concitoyen a visiblement pris un immense plaisir à les utiliser pour mettre en scène sa chèvre et ses cigognes en plâtre, ses amphores et ses boules de buis, dans son jardin tenu au bouton. Ces plantes de rocaille sont excellentes, mais comme pour toutes les bonnes choses, mieux vaut ne pas en abuser…

Précédent
Précédent

Des provisions de poireaux

Suivant
Suivant

La valse à quatre temps