La sauge salvatrice

Sauver et guérir, c’est le double sens du verbe latin salvare. C’est aussi l’origine du nom botanique de la sauge, Salvia, utilisé déjà à l’époque romaine. Ce billet porte sur notre sauge officinale ‘de cuisine’ (je reviendrai sur le vaste sujet des sauges à fleurs), présente dans le maquis méditerranéen et utilisée depuis l’antiquité tant par les guérisseurs que les cuisiniers. La plante requiert du soleil et un sol bien drainé, étant même adaptée à un jardin sans arrosage. Elle supporte plutôt bien le gel hivernal à condition qu’il ne soit pas combiné à un sol détrempé.

Produisant plus de feuilles que de fleurs, Salvia officinalis fait cependant une excellente plante de jardin, son feuillage formant de belles touffes compactes argentées. Elle convient particulièrement pour l’avant des parterres et les bords des chemins.

Salvia officinalis était cultivée dans les jardins de simples des monastères et considérée comme une des quatre herbes essentielles avec le persil, le thym et le romarin. Un des usages les plus courants est la tisane de sauge, fraîche ou séchée, pour soulager la toux et les maux de gorge. On peut d’ailleur l’associer au thym et au romarin et, bien sûr, y ajouter du miel. La phytothérapie prescrit la sauge sous diverses formes pour de nombreux maux.

Nous connaissons surtout le goût particulier de la feuille de sauge par son usage dans la cuisine méditerranéenne. Les saltimbocca (littéralement ‘saute en bouche’) sont par exemple un grand classique de la cuisine romaine. Une tranche de veau très fine est garnie d’un morceau de prosciutto avant d’y épingler une belle feuille de sauge entière avec un cure-dent. Le tout est sauté à la poële avec du beurre et de l’huile avant d’y ajouter un peu de vin blanc.

Tant pour l’usage en cuisine que pour sa valeur au jardin, je recommande de choisir une variété de sauge officinale à larges feuilles, produisant de belles feuilles ovales. Elle est parfois vendue sous le nom de Salvia officinalis latifolia. ‘Berggarten’ est un bon cultivar à grandes feuilles..

Pour les tisanes ou pour tailler les feuilles en lanières pour ses pâtes, Salvia officinalis ‘Nazareth’ est un très bon choix. Elle est réputée plus aromatique que la sauge officinale de base. Avec ses feuilles étroites densément couvertes d’un duvet presque blanc, cette sauge est de plus particulièrement décorative au jardin.

La sauge comestible se décline en diverses couleurs, permettant de créer des jardins d’herbes variés ou des potées originales.

La variété ‘Icterina’, bordée de jaune est très lumineuse et idéale dans le jardin jaune. Salvia officinalis ‘Purpurascens’ et ‘Tricolor’ se combinent avec les vivaces bleues, roses et blanches. La bonne nouvelle est que ces feuilles colorées sont tout aussi comestibles que les grises.

Vendue parfois dans les catalogues de plantes aromatiques, Salvia discolor est rare et originale. Ici, ce sont les fleurs qui se mangent. Noires et veloutées, elles sont particulièrement riches en nectar. L’arbuste est intéressant, avec des feuilles vert vif dont le revers est recouvert d’un duvet tout blanc. La plante est collante au toucher.

Je dirais qu’on peut tout au plus disposer quelques fleurs noires sur une salade ou une glace si on veut épater les invités. Cela reste cependant une belle plante pour le jardin aromatique.

La règle d’or, si on veut garder un beau feuillage et une forme compacte pour ces sauges, est de les tailler très sévèrement à la sortie de l’hiver. Après avoir retiré le bois mort éventuel, il faut couper toutes les branches le plus bas possible sans toutefois arriver au vieux bois. Ce sera villain pendant un mois mais c’est la seule manière de garder des plantes en forme pour plusieurs années. Cette opération radicale sera aussi l’occasion de prélever des boutures qui s’enracineront sans difficulté. Faites-le pour multiplier vos plantes, pour vous montrer généreux, mais aussi par précaution: les sauges sauvent mais n’ont pas la vie éternelle.

Précédent
Précédent

Entre la framboise et la mûre

Suivant
Suivant

Les hybrides de moschata, des roses au naturel