Plaidoyer pour un potager fleuri

Le mot potager est un mot français très ancien désignant le lieu ou l’on récolte les légumes et les herbes pour le potage. En anglais, cela se traduit par vegetable garden ou kitchen garden.

Les anglo-saxons utilisent toutefois aussi le mot potager, à prononcer avec l’accent (poe-ta-zhai) mais le sens est un peu différent. Le terme est réservé pour un jardin qui allie la fonction de fournir des fruits et des légumes avec une fonction ornementale. On y trouvera des structures, un dessin mais surtout des fleurs. L’utile est lié à l’agréable!

Les français en sont les maîtres et les jardins de Villandry sont le modèle mondialement connu du potager ornemental. Mais les exemples sont nombreux. Dans ce potager public on trouve les éléments classiques et un agencement symétrique des parterres qui contiennent fleurs et légumes. Le buis est largement utilisé pour délimiter les planches. Parasites et maladies cryptogamiques mettent toutefois en question cet usage pour l’avenir.

Le potager ornemental peut aussi se concevoir dans un style cottage charmant où tout se mêle dans un joyeux fouillis.

Pourquoi cultiver des fleurs parmi les légumes? Outre l’utilité évidente de disposer de fleurs à couper sans dégarnir ses parterres, les fleurs peuvent jouer un rôle utile pour favoriser et protéger les récoltes.

Les fleurs mellifères attirent les pollinisateurs et les auxiliaires qui assurent une bonne production.

Certaines plantes attirent les pucerons, les éloignant des cultures voisines tandis que d’autres ont une odeur répulsive pour les parasites.

Il y a aussi une gamme de plantes à fleurs utilisées comme engrais vert: la phacélie, le trèfle incarnat, la moutarde etc.

Enfin, n’oublions pas qu’il y a de nombreuses fleurs comestibles.

Le grand classique est la capucine, Tropaeolum majus, car elle peut quasiment être considérée comme un légume; les fleurs décorent les salades et les feuilles permettent de faire des pesto. Je les cultive depuis des années au même emplacement, sans aucun effort. Laissant dépérir les plantes sur place en hiver, elles se ressèment toutes seules au printemps. Un belle palette de couleurs est apparue au fil des ans.

La bourrache, borago officinalis, aux fleurs azur comestibles, se ressème aussi toute seule au milieu des capucines. Toutes deux attirent les pollinisateurs.

Les soucis, Calendula, sont parmi les annuelles les plus faciles à cultiver. Leurs couleurs jaunes et oranges égayent les planches de légumes. Les pétales sont comestibles et peuvent s’ajouter aux salades. Il en était fait grand usage en médecine traditionnelle, comme l’atteste l’épithète officinalis du nom botanique (de l’officine de pharmacie). De nombreux produits pour la peau contiennent de la Calendula pour ses vertus émollientes.

Semez une ou deux lignes aux printemps, directement en place. Les fleurs produisent de nombreuses semences qui se ressèment ensuite toutes seules pour plusieurs années. On peut trouver des sélections intéressantes, à coeur plus sombre par exemple.

Les tagètes, par leur odeur répulsive, sont de bonnes compagnes pour les choux. Elles sont aussi très mellifères. Leurs tons lumineux et chauds contrastent magnifiquement avec les légumes. Je n’aime pas particulièrement les grosses tagètes, plutôt raides, mais adore Tagetes tenuifolia (à feuilles étroites), qui forme des coussinets denses couverts de petites fleurs simples dans les tons jaunes et orangés. Elles peuvent être utilisées en bordure ou disséminées parmi les légumes.

Au lieu de tagète, on trouve souvent le nom d’oeillet d’Inde, ce qui prête à confusion car la plante est originaire d’Amérique Centrale et du Mexique. Ceci explique pourquoi elle ne supporte pas le gel, rendant sa culture un peu plus exigeante. Je sème en caissette et repique en pots dans la serre avant de mettre en place en mai après les gelées. Les plantes produisent des semences en abondance qu’il est facile de récolter en fin de saison.

Pour réaliser de belles bordures fleuries et comestibles, envisagez la ciboulette ou la ciboulette chinoise. La première, bien connue, fleurit au printemps. Ses jolies fleurs violettes sont elles aussi délicieuses. Une fois fanées il convient de couper la plante à ras pour lancer une nouvelle production de jeunes feuilles. En latin, la ciboulette s’appelle Allium schoenoprasum.

La ciboulettes chinoise, Allium tuberosum, a une feuille plate et produit des fleurs blanches en fin d’été. Pour le reste, ce petit bulbe a les mêmes qualités que notre ciboulette traditionnelle. Toutes les parties de la plante se mangent.

Pour une bordure non comestible on peut envisager du thym, du romarin, de la lavande ou de la santoline en sol drainé et climat doux. L’important et de les tailler le plus bas possible à la fin de l’hiver pour maintenir des plantes compactes.

L’entrée de mon potager est bordé d’alchemilles dans lesquelles je coupe sans restrictions pour les bouquets. Les grands pavots doubles violet foncé se ressèment spontanément parmi les choux marins.

Les tournesols sont de grands favoris pour les potagers des collectivités qui accueillent des enfants, fascinés par ces soleils plus grands qu’eux. On les voit ici associés aux cosmos. Toutes deux sont des fleurs annuelles que l’on peut semer sur place mais la réussite est mieux garantie si on les sème en pot (les souris sont très friands des graines de tournesol).

On trouve de belles sélections ornementales de tournesol, plus faciles à utiliser en vase que la version géante; le mélange ‘Beauté d’automne’ dans les tons cuivre et pourpre ou ‘Teddy Bear’, très double, par exemple.

Une fleur à couper épatante, produisant tout au long de la saison, est le zinnia. Il en existe dans des tons et des formes splendides qui s’associent harmonieusement aux roses ou aux dahlias. Rien de plus facile que de semer une ligne de cette belle mexicaine entre deux rangs de légumes. Les petites fleurs centrales attirent les pollinisateurs. Il faudra cependant être vigilant avec les limaces quand le semis commence à lever.

Les amateurs de bouquets d’automne cultiveront aussi des dahlias. Par leur taille, leurs formes et leurs couleurs d’une variété inouïe, on trouvera toujours des fleurs à assortir à son intérieur. Si on les cultive au potager plutôt que dans les parterres, c’est parce qu’en climat froid il faut déterrer les tubercules chaque année, dès le premier gel. On peut les remiser à l’abri dans des cageots pour les replanter en mai après les gelées. Pour les faire démarrer, il faut arroser si le printemps est sec et surtout empêcher les limaces de dévorer les jeunes pousses. Cette surveillance est plus facile à assurer dans le milieu contrôlé du potager.

Quelles sont mes autres favoris? Les grandes queues rouges des amarantes se ressèment toutes seules. Quelques roses hybrides et parfumées sont indispensables. Les iris dont les rhizomes nécessitent du soleil sont plantés sur le bord sud, le long de la palissade. Des pivoines s’alternent avec les plants de rhubarbe. La phacélie, un bon engrais vert très attractif pour les abeilles, peut être semé dès qu’une parcelle se libère, après la récolte des oignons par exemple. Enfin, une planche est destinée à des tulipes à couper.

Cela fait beaucoup de fleurs? Oui, mais rassurez-vous, il y a encore plus de variétés de légumes et de petits fruits… La casserole sera remplie et les vases aussi!

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