Quelques vivaces moins courantes dans les parterres d’automne
Vernonia
Les asters sont bien sûr les héros de l’automne, mais voici une astéracée américaine peu courante qui apporte une note de couleur magnifique: Vernonia crinata. La sélection plantée ici s’appelle ‘Mammuth’ et ce n’est pas pour rien: elle dresse des tiges vigoureuses qui n’ont pas besoin de tuteurs, jusqu’à près de 2m de haut.
Le genre Vernonia a été nommé pour un certain William Vernon, un botaniste de l’université de Cambridge qui récolta des plantes dans le Maryland à la fin du 17ème siècle. Ce genre compte de très nombreuses espèces, principalement sur le continent américain, mais aussi en Afrique et en Asie. Il est donc étonnant que la plante soit si peu présente en horticulture. ‘Mammuth’ appartient à l’espèce crinata, ce qui veut dire échevelé (pensez à crinière) et décrit ses fleurs en pompon. La variété ‘Summer Swan Song’ (le chant du signe de l’été) n’atteint que 80 cm et se distingue par son feuillage fin.
Cette vivace aime les sols riches, le soleil et une humidité suffisante. Dans ces conditions elle peut fleurir de septembre à novembre. On peut laisser les tiges fanées l’hiver ou les couper à la base selon ses préférences esthétiques. Au printemps, la vivace repart de la base et peut se diviser pour lui redonner vigueur.
Ageratina
Voici une autre asteracée ébouriffée peu courante: Ageratina altissima ‘Chocolate’. On la trouve encore parfois sous le nom de Eupatorium rugosum ‘Chocolate’ mais elle a été reclassée. Cette vivace est originaire d’Amérique du Nord et aime un sol assez humide, à mi-ombre ou au soleil. Cette sélection produit un très beau feuillage couleur chocolat au printemps. A partir de septembre-octobre apparaissent les panicules de fleurs blanches en pompons. Elles durent longtemps et leur nectar est très attractif, une aubaine en fin de saison. Le contraste avec le feuillage est étonnant, même si celui-ci redevient vert au moment de la floraison. Cette vivace atteint environ 1,20m et convient pour l’arrière des parterres. Elle disparaît l’hiver et peut se diviser au moment où elle repousse au printemps. La plante est une aubaine pour les parterres mais très toxique pour le bétail: tenez vos chèvres et vos moutons à distance!
Strobilanthes
Voici une autre vivace peu commune, la strobilante, nom commun qui n’est pas plus simple que le nom botanique (de strobilos, le cône et anthos, la fleur en grec). La caractéristique de cette plante qui nous intéresse est effectivement sa production automnale de fleurs tubulaires bleu-violacé.
Le genre Strobilanthes comprend essentiellement des espèces tropicales dont une en particulier, Strobilanthes dyerianus ‘Purple shield’ est proposée comme plante d’intérieur pour son feuillage remarquable pourpre et argenté.
L’espèce qui nous intéresse pour les jardins est S. pentemonoides (parfois vendue comme S. violacea). Du fait de son origine himalayenne, elle est parfaitement rustique et supporte même les hivers détrempés. Une fois établie, cette vivace peut atteindre 1m en tous sens. Son feuillage ovale, finement dentelé, est d’un vert frais mais débourre tardivement. Pas de panique donc si la plante paraît morte jusqu’en mai!
On peut utiliser le strobilante en sous-bois mais aussi en plein soleil dans un sol riche et frais. Les branches qui touchent le sol marcottent aisément. L’effet général est léger et gracieux plutôt que tape-à l’oeil.
Ceratostigma
Qui ne peut être émerveillé par les fleurs bleu gentiane des Ceratostigma, appelés en français dentelaires, dieu sait pourquoi?Provenant également de l’Himalaya, le genre partage quelques caractéristiques avec la strobilante ci-dessus: un démarrage tardif au printemps compensé par une longue floraison automnale, d’août à novembre.
Nous cultivons essentiellement deux espèces. La première, illustrée ici, est Ceratostigma plumbaginoides. Le genre appartient effectivement à la famille des plumbaginaceae, dont le représentant de référence est le Plumbago, cette magnifique grimpante aux fleurs bleu ciel. C. plumbaginoides est un couvre-sol remarquable qui s’étend en drageonnant, sans être toutefois envahissant. Il aime les sols drainés, voire rocailleux. Il se plaît en Belgique (au soleil) mais se porte aussi à merveille dans mon jardin sec en Italie (à l’ombre). Le feuillage prend des tonalités rouges en fin de saison.
Très similaire par ses qualités mais formant un sous-arbrisseau qui peut atteindre 1m, nous trouvons Ceratostigma willmottianum. La sélection ‘Forest Blue’ est plus florifère que le type. Les branches fines et souples de s’enfilent aisément parmi d’autres plantes dans les parterres pour un effet charmant. Ces petites fleurs bleues durent très longtemps et défient le mauvais temps.
Ceratostigma willmottianum est l’occasion d’évoquer l’extraordinaire miss Ellen Willmott (1858-1934) en l’honneur de qui cette espèce fut nommée; la jardinière anglaise excentrique par excellence! Miss Willmott hérita d’une importante fortune de sa grand-mère, et du virus botanique par la même occasion. Propriétaire d’une importante propriété, Warley Place, elle allait y ajouter un jardin en France et un autre en Italie pour accueillir ses vastes collections. Elle employa en conséquence jusqu’à une centaine de jardiniers, tous masculins. Patronne redoutable, une mauvaise herbe dans un parterre pouvait justifier un renvoi. En revanche, il n’y eut pas d’homme dans sa vie privée …Cette passionnée de raretés finança plusieurs expéditions de chasse aux plantes inconnues, notamment en Chine. Plus d’une cinquantaine de plantes lui furent dédicacées en conséquence. Elle reçut les plus grandes distinctions honorifiques de l’univers botanique. Advint cependant ce qui devait advenir; dépensant sans compter pour sa passion, elle finit ruinée et ses propriétés furent vendues à l’encan. Warley Place fut même détruit. Ce personnage hors du commun, également photographe et écrivain, a fait l’objet d’un livre: Miss Willmott’s Ghost.